L'Allemagne: Un conte d'hiver

Caput XVII

Text by Heinrich Heine (1797-1856)
traduit en français par Joseph Massaad

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Avant-propos| Adieu | I | II | III | IV | V | VI | VII | VIII | IX| X | XI | XII | XIII | XIV | XV
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Je me suis disputé avec l'empereur,
En rêve, seulement en rêve, c'est bien certain.
Quand on est réveillé, on ne parle pas,
D'une façon aussi insubordonnée, aux souverains.

C'est en rêvant, dans un rêve idéal,
Que le courage de l'Allemand est tel,
Qu'il ose leur dire l'opinion allemande,
Profondément gardée dans son cœur fidèle.

En me réveillant, je traversai un bois;
À la vue des arbres, de la vérité,
Faite de bois dénudés,
Mon rêve se retrouva effarouché.

Les chênes secouèrent sérieusement leurs chefs,
Les bouleaux et leurs rameaux, à partir des hauteurs,
Me firent des signes d'avertissements; je dis:
«  Pardonne-moi, mon cher empereur!

Ô Barberousse, pardonne-moi ce mot rapide!
Tu es bien plus sage que moi, je le sais,
Et j'ai si peu de patience, mais mon empereur
Reviens vite, sans plus tarder!

Si la guillotine ne te plais pas,
Reste donc avec les vieux moyens:
L'épée pour les gens nobles,
La corde pour les paysans et les citoyens.

Mais, de temps en temps, change,
Et fait pendre les nobles, décapite un peu
Les paysans et les citoyens, en fin de compte,
Nous sommes tous des créatures de Dieu.

Rétablis les tribunaux de la peine de mort,
Que Charles Quint avait institué,
Et divise de nouveau ton peuple,
Selon rang et corps de métier.

Rétablis le vieux Saint Empire Romain ;
Il doit être entièrement rétabli.
Rends-nous les guenilles les plus moisies,
Avec toutes leurs friperies.

Le moyen âge, du moins,
Le vrai, tel qu'il a été en son temps,
Je le supporterai; délivre-nous
De cet état bâtard, uniquement,

De cette chevalerie dégradée,
De ce mélange dégoûtant
De chimère gothique et de fraude moderne,
Qui n'est ni viande ni poisson.

Chasse la bande de comédiens,
Et ferme les théâtres où sont représentées
Des parodies sur les temps anciens.
Ô empereur, reviens sans plus tarder! »

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