Je dormai d'un tendre sommeil

Text by Heinrich Heine (1797-1856)
Traduit en français par Joseph Massaad 

deutsch - english


Je dormai d'un tendre sommeil,
Sans aucune peine et sans soucis;
Quand vint en rêve, et sans pareille,
La plus belle de toute les jeunes filles.

Pâle comme marbre, me sembla-t-elle,
Pourtant merveilleuse, en secret;
Son œil scintillait comme une perle,
Ses cheveux drôlement flottaient.

Ensuite se meut, avec douceur,
La fille comme marbre, par sa pâleur;
Et puis s'étend près de mon cœur,
La fille comme marbre, par sa pâleur.

Comme tremble et bat, d'un doux chagrin,
Mon cœur, et comme il s'enflamme!
Ni tremble ni bat son joli sein,
De glace demeure la jolie femme.

« Ni tremble mon sein, ni bat mon sein,
Il reste glacé pour toujours;
Pourtant j'connais bien le divin
Et tout puissant plaisir d'amour.

Ma bouche, mes joues sont sans couleur,
Aucun sang n'y pompe mon cœur;
Mais ne frémis pas, n'aies pas peur,
Bonne et douce, je te demeure.»

Et avec passion, elle m'enbrassa,
Je sentis presque une douleur.
Puis disparut, quand l'cocq chanta,
La fille, comme marbre par sa pâleur.