Mon coeur, mon coeur est triste

Text by Heinrich Heine (1797-1856)
Traduit en français par Joseph Massaad

deutsch | english


Mon coeur, mon coeur est triste,
Pourtant le gai mois de Mai brille;
Je reste, appuyé sur le tilleul,
Là-haut, sur la vieille bastille.

En bas, le bleu canal de la ville,
Coule tout calmement;
Un garçon y passe avec sa barque,
Il pêche en sifflotant.

De chaque rive se dressent amicalement,
En formes menues et colorées,
Des maisons de joie, et des jardins et des hommes,
Et des taureaux, et des prairies, et des forêts.

Les jeunes femmes blanchissent le linge,
Elle jouent sur l'herbe en sautillant;
La roue du moulin pulvérise des diamants,
J'entend son lointain bourdonnement.

Sur la vieille tour grise,
Une petite guérite se dresse;
Une ordonnance en costume rouge,
Y fait sa ronde, sans cesse.

Il joue avec sa carabine,
Elle brille dans le soleil,
Il présente et il épaule,
Je me souhaite son tir mortel.