Atta Troll. Songe d'une nuit d'été

Text by Heinrich Heine (1797-1856)
Traduit en français par Joseph Massaad 

Caput II - deutsch

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Que le prince noir de Freiligrath
Tambourine, nostalgique et vigoureux,
Sur la peau du grand tambour,
Jusqu'à ce qu'il se fracasse en deux:

Ceci est vraiment touchant,
Et pour la peau du tambour, fracassant.
Mais il faudrait penser quand même
A cet ours qui se libère de ses chaînes!

La musique et les rires s'effacent,
Et c'est avec des cris d'angoisse,
Que s'élance, hors du marché, la populace,
Tandis que les dames blêmissent.

Oui, Atta Troll se libère
Des chaînes de l'esclavage.
Il court à travers les rues étroites,
En sautillant d'un air sauvage.

Chacun lui cède poliment la place.
Il escalade les haut rochers,
Regarde vers le bas, comme par mépris,
Puis, dans les montagnes, disparaît.

Sur la place du marché il ne reste
Que la Mumma noire solitaire
Et le montreur d'ours. Avec vigueur,
Il lance son chapeau par terre,

Il le trépigne, il piétine
Les madones! il arrache la couverture
De son corps hideux et nu,
Cette ingratitude le fait gémir, il jure

A cause de l'ingratitude de l'ours noir!
Car c'est en ami qu'il avait traité
Atta Troll, et ce depuis toujours.
Il lui avait enseigné à danser.

Il lui était redevable de tout,
Même de la vie, car c'est sans résultat,
Qu'on lui aurait proposé cent Thalers
Pour la peau de son cher Atta!

C'est sur la pauvre Mumma noire,
Cette image muette du chagrin,
Qui, devant cet homme des plus furieux,
Sur ses pattes arrières, se tient,

Que retombe la colère du grand furieux,
Finalement, doublement sévère, la battant
Il la nomme reine Christine,
Madame Munoz et putain, également.

Ceci se passa en été
Durant un bel et chaud après-midi,
Et c'est par une nuit superbe
Que ce jour charmant fut suivi.

C'est sur le balcon que je passai
Presque la moitié de cette nuit-là.
Observant les étoiles,
Juliette se tenait à coté de moi.

Elle soupira et déclara: « Ah, les étoiles
Sont les plus belles à Paris,
Quand elles se reflètent en hiver
Sur la crotte des rues, la nuit. »

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